Archives du Théâtre 140


Trop peu de 'Bossa-Nova' mais un excellent Nougaro



Le Peuple

17-11-1967

AU THEATRE 140

Trop peu de "Bossa-Nova" mais un excellent NOUGARO

« Bossa Nova Jazz à Montparnasse »... est un hochepot sympathique que l'on déguste actuellement au théâtre 140 et ce jusqu'à dimanche prochain. Tous les ingrédients n'en sont pas parfaits, certains ont un petit goût de trop peu, d'autres manquent de piquant, mais l'ensemble est éminemment jeune, avec une large place faite au dynamisme et un grain de poésie qui s'y est égarée.

Le petit goût de trop peu, c'est Normando qui donne une part du titre au spectacle et se présente comme vedette brésilienne de la bossa nova. Cinq chansons à peine et il disparait déjà alors qu'on en voudrait encore.

Perché comme un oiseau solitaire sur un rocher, il distille du rythme, de la mélancolie, une joie qui ne se déchaîne pas, une tristesse qui n'éclate pas en sanglots... il joue de la bossa nova du haut d'un tabouret de bar, immobile, penché sur sa guitare, avec une richesse d'invention étourdissante. C'est pour le public bruxellois une véritable découverte de la bossa nova car jamais on ne l'a entendue ainsi chez nous.

Nicole Croisille c'est pour beaucoup la voix féminine qui chante dans « Un homme et une femme », le film de Claude Lelouch. Elle est l'interprète de chansons de Pierre Barouh et c'est tantôt réunis, tantôt se succédant, que Barouh et Croisille apparaissent sur la scène du 140.

Mais si la personnalité scénique de la jeune femme est incontestable, celle de Pierre Barouh l'est beaucoup moins. Il est vrai qu'il ne fait montre d'aucune prétention dans ce domaine, chantant sur scène comme il chanterait dans sa salle de bains, en toute simplicité. C'est fort sympathique mais un peu peu pour faire un tour de chant... alors que Pierre Barouh compositeur a une inspiration poétique qui mérite d'autres interprètes que lui-même.

Quand à Nicole Croisille, on l'a comparée à Sarah Vaughan.

C'est peut-être abusif mais il est exact qu'elle est l'une des rares chanteuses françaises à pouvoir interpréter du jazz avec un sens profond du rythme, une voix aux tonalités voilées et des inflexions qui parfois font songer à... Marilyn Monroe.

Restait Claude Nouaaro. Un Nougaro plus trépignant que jamais, possédé d'une sorte de rage de communiquer tout ce qui bouillonne en lui. Lui aussi est considéré comme étant le seul chanteur susceptible de faire « passer » le jazz en français, et tout ce qu'il compose et interprète s'abreuve directement aux sources du jazz le plus foisonnant, le plus délirant. Certaines ne sont que des chansons-prétextes des jeux de mots et de voix pour servir de contrepoint au jazz, d'autres ont une qualité humaine propre au texte et s'ajoutent au jazz pour en faire ces chansons-réussites que sont « Annie couche-toi là », « Sing-Sing », « Armstrong »ou « Bidonville », pressant appel à la fraternité. Sans oublier une chanson nouvelle, tendre et déchaînée à la fois : « Le petit taureau » ou les amours d'un taureau et de la reine des abeilles.

Voilà « Bossa nova jazz à Montparnasse », une soirée où l'on a l'impression d'être avec des amis, mais qui n'aurait pu être ce qu'elle fut sans la participation à deux cents pourcent de Maurice Vender et son sextet de jazz, celui qui est l'accompagnateur de tous les grands jazzmen de passage à Paris.

Chris L.

Auteur Chris L.

Publication Le Peuple

Performance(s) Bossa-Nova Jazz à Montparnasse

Date(s) du 1967-11-15 au 1967-11-19

Artiste(s) Claude NougaroPierre BarouhNicole CroisilleMaurice VenderNormando

Compagnie / Organisation