Archives du Théâtre 140


Les Pink Floyd. Beaucoup de sons et peu de lumière…



Le Soir

29-9-1969

Au Théâtre 140

LES PINK FLOYD

Beaucoup de sons et peu de lumière…

S'il est vrai que notre civilisation est celle du bruit, les Pink Floyd en sont un des plus dignes représentants. Ces cinq jeunes, reconnaissons-le, y mettent tout leur cœur pour faire déferler sur la salle - jusqu'à dimanche soir celle du Théâtre 140 — des ondes sonores qui semblent d'ailleurs parfois naître de la mer : ricanements de mouettes, impacts de vagues. Mais quand l'océan semble submerger le public il est bon d'avoir les tympans bien protégés. Il n'est pas question de gouttelettes debussvstes d'un jardin sous la pluie mais de paquets de notes, de lames de sons préenregistrés, de raz de marées nés d'explosions nucléaires sous-marines.

Le programme affirme que le groupe est le porte-parole musical d'une nouvelle vague. Pour demeurer sans doute dans la métaphore maritime.

Le programme parlait aussi d'un « groupe musical composé de lumière et de son ». La première formation, parait-il, à tirer des effets du mélange son-images. « A leur étrange musique répondait tout au jeu de colorations ». Force nous est de dire qu'en dehors d'un écran de fond rose — « Pink » oblige — pour la première partie et vert pour la seconde, l'appareillage électrique semblait plus concentré sur le secteur « son », que sur celui de la lumière. Mais il parait que les bariolages a coups de projecteurs psychédéliques sont dépassés, remises au grenier où peut-être la nouvelle vague de 1990 les découvriront pour nous les resservir à quelque sauce lunaire. Tous les groupes « pop » utilisent les effets lumineux, c'est pourquoi les Pink Floyd les abandonnent. Cette politique d'originalité pourrait évidemment les amener à redécouvrir le silence...

Et la musique dans tout cela? Reconnaissons une volonté et même une incontestable réussite dans la recherche d'effets nouveaux. L'électronique peut beaucoup et nos cinq musiciens savent s'en servir. Comme de leurs guitares, de l'orgue, du mélotron aux sons révolutionnaires, de la batterie assiégée en règle, de timbales attaquée à bon escient, d'un spectaculaire gong oriental et même d'un bon vieux trombone qui permit une plaisante évocation de l'évolution du blues vers le « pop ».

Il parait que les Pink Floyd fabriquent la musique de demain. Espérons quand même que ce n'est pas de cette manière que chanteront nos lendemains.

M. D. J.

Auteur mdj

Publication Le Soir

Performance(s) [concert]

Date(s) du 1969-09-26 au 1969-09-28

Artiste(s) Pink Floyd

Compagnie / Organisation