Archives du Théâtre 140

Le Soir

10-1-1970

AU THEATRE 140

Le grand Magic Circus et ses animaux tristes

L'humour bête et l'autre...

Si vous avez gardé votre âme d'enfant, si la naïveté bonhomme apparente vous charme, si le spectacle estudiantin vous ravit, si vous brûlez de voir un théâtre dont chaque spectateur tient à la main une pièce d'artifice qu'on lui a distribuée afin d'illuminer une crèche ô combien fantaisiste, ne lisez pas plus avant et allez au Théâtre 140 où « le Grand Magic Circus et ses animaux tristes » vous propose l'Humour bête et l'autre. Vous en aurez ainsi la surprise et vous vous laisserez emporter par la poésie canularesque de Jérôme Savary et de ses camarades. Car l'imprévu compte beaucoup dans le plaisir que l'on prend à cette représentation pas comme les autres.

Bien sûr, une surprise peut être mauvaise. Mais l'affiche vous aura prévenu : l'humour bête et l'autre. Disons que le programme tient ses promesses. Autrement dit, il n'y a pas que l'autre humour. Au reste, le service de presse du « 140 » nous a envoyé un texte où il est précisé : « La poésie du saugrenu! Mais ici préparons-nous au pire... » Puisque vous avez lu ce compte rendu jusqu'ici, vous voilà prévenu. Ceci dit, il est d'excellents moments dans cette parade à la bonne franquette. A défaut de mise en scène barnumesque, ce « cirque » fait appel à quelques auteurs honorablement connus: Victor Hugo (Waterloo et la Retraite de Russie), Molière (Le petit chat est mort). Vous aimez Gauguin et Van Gogh? Vous verrez à l'œuvre vos deux peintres favoris. Vous ne les aimez pas? Il n'y sont guère flattés. Dès lors...

Bien entendu, il y a des tas d'autres choses dans ce cirque (en dépit de la retraite de Russie, rien à voir avec le Cirque de Moscou, prière de ne pas confondre) et ce vendredi on nous promet même l'élection d'une « Miss Magic Circus » parmi les spectatrices. Et si le programme ne vous plaît pas, vous rirez probablement en lisant celui que vous vendra l'ouvreuse car il contient un « catalogue hiver-printemps 70 » qui vous vaudra peut-être un franc succès dans les « banquets, fiançailles, mariages, avec musique à danser et court tableau grivois » ainsi qu'il y est dit.

Terminons par un mot des acteurs. Suivant la formule consacrée, ils sont trop nombreux pour que nous les citions tous. Outre Savary, distinguons quand même Daniel Lalou, excellent dans chacune de ses interventions. Enfin, si vous êtes sensible au charme des marches de Souza, soyez à l'heure prévue pour le tout du spectacle. Vous aurez ainsi l'occasion d'entendre d'abondance votre compositeur préféré.

M. D. J.