Archives du Théâtre 140

Théâtre 140

saison 1970/71

service de presse

140, avenue Plasky,

1040 Bruxelles.

INFORMATIONS URGENTES

du 20 avril au 18 juin 1971

En Belgique : "Schaerbeek libre au Théâtre et dans la rue?"

Un grand événement underground à BRUXELLES.

Un arrondissement de Bruxelles déclare la guerre aux cloisonnements qui séparent "la fête", sa signification et le grand ordinaire de la semaine.

Cela veut dire quoi?

Il va se déclencher une énorme action dans un quartier précis, action quelquefois réfugiée dans de tous petits événements (ex.: mise sous cloche de plexiglass d'une "herbe folle" ou d'une "flaque d'eau" avec écriteau circonstancié en français, flamand, espagnol,italien et arabe, (les ouvriers étrangers étant nombreux à Schaerbeek)).

Une action dessinée, construite dans et hors les murs du Théâtre 140,

entrepôt du théâtre nouveau et de la pop music, de l'Algol, maison communautaire, de Mass Moving, Yucca et du Théâtre Laboratoire Vicinal.

Schaerbeek, qui a été la patrie occasionnelle du Living Theatre, va devenir durant deux mois la cathédrale de "l'art pauvre", du pop art inencadrable, du chef d'oeuvre périssable à consommer tout de suite, et la population s'en mêlera, les commerçants, les étudiants...ou bien ce sera raté.

Place Liedts, carrefour de grande circulation, action d'environnement appellée "la place n'est plus grise", un terre-plein livré aux pots de couleurs, des panneaux d'affichage réquisitionnés par les élèves des beaux arts, fleurs peintes sur le trottoir aux arrêts du tramway.

Un concert "free" sur la pelouse du Tir à l'arc du parc Josaphat, free show avec Ray Blitz, Arkham, Burning Plague et Kleptomania… et des solistes de free jazz…et une "intervention" à imaginer. Le jeudi 22 avril partir de 19 heures.

Au Théâtre 140, le Ridiculous de New York ridiculisera vraiment

notre petit univers jusqu'à la limite du mauvais goût délibéré!

Propos de John Vaccaro, metteur en scène du Ridiculous de New York, le fameux théâtre de la dérision:

"Je n'ai jamais compris pourquoi, en 1970, ou en n'importe quelle année où j'ai monté des spectacles, ou simplement vécu, pourquoi le sommet de l'investigation psychologique au théâtre c'est toujours l'homme opposé à lui-même? Le problème aujourd'hui est universel, global.

Nous ne faisons jamais de pièces à propos des états d'âges de personnes individuelles.

Dans le "Dessein audacieux d'Indira GARDAI" de Ron TAVEL, nous avions un tas d'actions, un tas de choses qui ne se trouvaient pas dans le texte, c'est à dire que quand Ron l'a écrit pour la première fois, ce que j'eu c'est Madame GANDHI et son ministre parlant de choses très étrangères à ce qu'ils faisaient. Après qu'ils aient terminé de faire l'amour elle lui demande :"qu'allez vous faire à propos du problème alimentaire?" C'était très amusant.

Le théâtre,le cinéma conventionnel n'est pas honnête. Songez un film comme "Samedi soir et dimanche matin"; ou à tous ces vieux Tarzan ou ces films de jungle. Tous ces euphémismes. Les amoureux se rapprochent et soudainement la caméra monte dans les branches où les singes deviennent fou à la vue de ce qui se passe en dessous. Je ne veux pas voir les singes. Ils me disent qu'il y a quelque chose de sale qui se passe. Voyons la chose réelle, si c'est "honest".

Le Ridiculous jouera "Heaven Grand in Amber Orbit", une énorme fête d'une parfaite férocité qui vise le sérieux des institutions et le mensonge de nos attitudes sentimentales ennoblies par l'"establishment".

Vingt chansons soutenues par des guitares et des percussions. Ce n'est pas une comédie musicale, c'est un théâtre, quelquefois chanté...

C'est évidemment visuel et les intentions sont claires. Le texte n'y est pas une prison littéraire, il est aussi peu déterminant que des conversations entendues en tramway ou des attendus de justice ou des pages du bottin. Le texte est un décor que l'action réduit en poussière. Il n'est pas indispensable de comprendre l'anglais, mais il faut le voir en langue originale. Ce spectacle est très éloigné de la dialectiaue du Living Theatre ou du Bread and Puppet. C'est une autre démarche, beaucoup moins "moralisatrice".

Le 21 avril à 18 heures: Parade du Ridiculous dans les rues.

Du 20 au 25 avril à 20h30 au Théâtre 140: "Heaven Grand in Amber

Orbit" par le Ridiculous Le 19 à Minuit au Théâtre: représentation privée de "Cockstrong" autre spectacle du Ridiculous.

en mai : une aventure anti-théâtre à l'Algol, avenue Demolder; une espèce d'enquête sur nos gestes quotidiens.

de la mi-mai à la fin mai: occupation saugrenue mais significative d'un jardin public.

Actions au parc Josaphat (avec l'appui de la municipalité) (voir p. 3)

Les 4, 5 et 6 juin: le "SCARABEE" de la Haye, théâtre pop art de

la nouvelle hollande. Le seul exemple de théâtre pop art, un théâtre d'images, ordonné par des peintres, des sculpteurs, des graphistes et des spécialistes de "l'art pauvre". (100 personnes admises par représentation). Et bien sûr, parade dans les rues.

Mi juin "Alice in Wonderland", la grande rêverie dangereuse "off off" Broadway. Spectacle d'André GREGORY.

Quelques détails de "L'action au parc Josaphat":

— les intervenants sont vêtus de vert.

— mercredi 19 mai: une famille "modèle" s'extrait d'une station wagon et se répand sur la pelouse pour y faire un ignoble pique-nic avec tout le matériel idoine, mais "démesuré".

— samedi 22 mai: tracer une autoroute aux dimensions réglementaires avec tous les éléments: bandes, signaux, talus de séparation, béton... de deux mètres de long. Distribution d'un tract pour un projet d'autoroute reliant le boulevard Lambermont à l'avenue des azalées et devant compléter le "ring".

— dimanche 23 mai: sur la route séparant le parc en deux, mannequin renversé par une voiture, attroupement, sirènes, dessin de toutes les indications: voiture, trace de pneu, mannequin, emplacement des gens, etc...

Mass Moving imprime des fleurs sur la route.

— mercredi 24 mai: tapisser le Kiosque de papier à fleurs et placer sur les troncs d'arbres avoisinant des bandes d'autocollants imitation bois.

— samedi 29 mai: Inauguration de l'autoroute. Bal populaire.

— dimanche 30 mai: étendre des couvertures bleues, placer des panneaux "PRIERE DE S'ETENDRE SVP". Rusée: des boîtes de conserve de fruits ou de légumes. Serre pour les amoureux. Actions: un certain nombre de musiciens circulent seuls dans le parc où ils jouent.

Jeux d'enfants: boîtes de craies pour dessiner sur les sentiers.

(initiative: groupes Algol, Mass Moving, théâtre 140, Yucca et la municipalité.)

Le but de ces actions est assez clair:

Provoquer chez le promeneur habitué de ce parc, le badeau occasionnel ou chez une foule plus particulièrement schaerbeekoise, une attitude critique, passionnelle vis à vis du système social-esthético-culturel qui leur est proposé par les marchands de succédanés et par un certain enseignement en panne de communication réelle. C'est moins négatif que cela d'ailleurs, que la fête fasse réfléchir. Et réfléchir doit rester amusant.