Archives du Théâtre 140


Le 'Velvet Underground': un groupe qui n'a plus qu'injustement le nom de ses prédécesseurs



Le Soir

14-10-1971

AU THEATRE 140

LE « VELVET UNDERGROUND »: un groupe qui n'a plus qu'injustement le nom de ses prédécesseurs

Les amateurs de « pop music » ne risquent pas de confondre de sitôt le « Théâtre 140 » et le « Café Bizarre ». Et le concert auquel ils ont assisté mardi soir, en surnombre, à Bruxelles, ne leur laissera le souvenir que d'un groupe décadent qui continue injustement à bénéficier du nom qu'ont imposé avant lui ses prédécesseurs.

Que reste-t-il du Velvet d' « Héroïne », de « Venus in Furs », de « Sunday morning »? Maureen Tucker à la batterie. Point à la ligne. C'est trop peu pour assurer la continuation d'un groupe qui fit, de 1965 à 1968, les beaux jours de la musique « rock » américaine. Lou Reed aurait renoncé à toute activité musicale. John Cale vient d'enregistrer « Church of anthrax » avec Terry Riley. Quant à Nico, il a publié coup sur coup « Chelsea Girl », « The Marble Index » et « Desert Shore ». Mais on ne retrouve aucun de ces trois noms dans la formation actuelle. La supercherie est donc de taille. Elle est assurée, dans l'ordre, par William Alexander, Douglas Yale, Maureen Tucker et Walter Powers, et qu'on soit assuré que leur musique aurait une chance de plaire dans une foire ménagère. Le premier essore ses chansons avec la maestria d'une lavandière. Le second, à la basse, ressemble à s'y méprendre à un battoir monté sur des échasses. La troisième ne semble dans la vie qu'avoir un but : crever ses « drums ». Seul le pianiste prend ses distances vis-à-vis du « rock » démode et graisseux de ses partenaires : on ne l'entend pas. Au total, une heure de frémissements gratuits gentiment fristouillés.

Si le métro parisien n'est qu'en grève provisoire, le métro de velours américain l'est, lui, de manière définitive.

Jelly Fish

A tout prendre, nous avons préféré la prestation en avant-programme de l'ensemble belgo-franco-hollandais « Jelly Fish ». Composé de Dirk Devries à la basse, Koen Debruyne à l'orgue, François Arnaudeau à la guitare, Tony Tans aux « drums », et Freddy Deron à la trompette électrifiée, cette formation, dont c'était le deuxième passage important en public, peut s'appuyer sur deux solistes valables, Debruyne et Deron. L'écriture, d'une manière générale trop sommaire, amalgame le jazz, la musique classique et la « pop music ». Il y a des longueurs, des répétitions, un manque d'intention effective, mais certains passages ont de l'étoffe, et l'on ne lésine pas, chez le « Jelly Fish », sur les envolées.

Au total, une musique trop désordonnée, mais qu'il suffira de tempérer pour en obtenir plus d'obéissance et d'impact. Au regard du Velvet, les regrets paraissent minces.

André DROSSART.

Auteur André Drossart

Publication Le Soir

Performance(s) [concert]

Date(s) 1971-10-12

Artiste(s) The Velvet Underground

Compagnie / Organisation