Archives du Théâtre 140


Zartan, par le Magic Circus de J. Savary



La Libre Belgique

28-11-1971

Au Théâtre 140

ZARTAN, par le Magic Circus de J. Savary

Comme le pastiche en littérature, l'art de la parodie théâtrale a ses lois. L'indispensable gauchissement du trait caricatural, outrancier par définition, doit cependant s'harmoniser avec le clin d'œil de la finesse, une complicité allusive, et une invention jaillissante, si possible originale.

Avec « Zartan, frère mal aimé de Tarzan » on est loin de compte. Le grotesque s'installe, prend ses aises, tourne â vide et... tombe à plat. On se demande comment plusieurs rubriques parisiennes, et non des moindres, ont bien pu entonner le péan envers la troupe que Jérôme Savary a baptisée « Le Magic Circus et ses animaux tristes » et le spectacle qu'elle présente.

Au départ, l'entreprise en valait bien une autre, elle paraissait même sympathique : moquer le personnage mythique de bande dessinée créé par Edgar Rice Burroughs en insérant ses aventures dans le contexte, railleur lui aussi, du cirque. Las! C'est pachy-dermique, appuyé, insistant. Une morne parade, en 27 tableaux qui tiennent à la fois de la fête scolaire, de la revue de mauvais vaudeville, de la bacchanale de carabins et du cabaret équivoque. Certains divertissements de clubs de vacances offrent même souvent mieux et sans prétention. Nous avons vu ainsi un jour certain pseudo-feuilleton « Zorbec le gras » qui ne se croyait pas tenu, comme ici, de susciter l'hilarité par les effets les plus faciles : déformations de l'accent anglais, déculottages (ah! ah!), jets de farine sur les spectateurs (ah! ah! ah!) et autres vulgarités.

Toutes les prétendues trouvailles sont de celles qui ont traîné ailleurs de longue date (les Branquignols de Dhéry, Roland Ravez, déjà, pour ne rien dire de Obaldia, Planchon, « Hair ») tandis que les « audaces » dites au goût du jour ont l'air de se démoder instantanément...

Les seules drôleries fugitives proviennent des apparitions d'une reine d'Angleterre, d'opérette, et de Jérôme Savary, qui témoigne d'une franche vis comica dans sa faconde de bonimenteur forain; ses commentaires dérident au second degré, précisément parce qu'ils reconnaissent sans vergogne la médiocrité, le mauvais goût ambiants.

Mais Savary prêche dans le désert de son « opéra tropical » qui réclame, faut-il le dire, de sérieuses réserves. Son erreur, ou à tout le moins son infortune, ç'aura été de faire confiance à de pauvres compères amateurs qui ne savent pas chanter, pas danser, pas jouer (ni juste, ni faux) pas dire un texte, fût-il des plus rudimentaires. En revanche, ces chevelus savent faire la quête et se muer en cascadeurs pour escalader les fauteuils de la salle, des premières rangées aux derniers fauteuils.

J. P.

Auteur J.P.

Publication La Libre Belgique

Performance(s) Zartan, frère mal aimé de Tarzan

Date(s) du 1971-11-25 au 1971-11-28

Artiste(s)

Compagnie / Organisation Le Grand Magic Circus et ses animaux tristes