Archives du Théâtre 140


'Zartan, frère mal aimé de Tarzan'. Une farce qui tient plus du chachut que du théâtre



Le Phare Dimanche

5-12-1971

AU THEATRE 140 : LE GRAND MAGIC CIRCUS

« Zartan, frère mal aimé de Tarzan »

Une farce qui tient plus du chacut que du théâtre

Parmi les curieux — sincères ou snobs — des formes « non-officielles » de renouvellement du théâtre, on parle beaucoup d'une troupe joyeuse, un peu anarchique, ironique, où l'on aime la bouffonnerie de style forain : « le Grand Magic Circus et ses animaux tristes » de Jérôme Savary et ses camarades.

Cette troupe bigarrée et insolite donne, on le sait, au 140 des représentations de son dernier spectacle-fête : « Zartan frère mal-aimé de Tarzan ». Il n'est pas très sûr que de grandes nouveautés salvatrices surgissent de cette sorte d'énorme revue d'étudiants, pleine de bruits, de rythmes et de parodies délibérément grosses, pour la rigolade. Mais la gaieté de l'ensemble — qu'il faut, soulignons-le, regarder et écouter dans l'optique boa enfant d une farce étudiante — est bien plus sympathique et libre de prétention que les exténuantes élaborations de sadisme intellectuel que l'on nous sert ailleurs — également pour renouveler le théâtre.

Ici, sans se fatiguer — a part le bruit — on s'amuse sans complications.

Bien que le spectacle soit trop long pour son contenu un peu mince, il est mené avec beaucoup d'entrain et dans un mouvement endiablé d'un bout à l'autre de la salle qui est cernée par plusieurs estrades et même survolée par une corde pour équilibristes. Il n'y a là rien de particulièrement aggressif, malgré les irrévérences d'usage (dont il ne faut pas se formaliser si on met les pieds à ce genre de spectacle). Pour corser le produit et le rendre plus avant-gardiste et plus rentable à peu de frais, on nous montre, dans le goût du jour, plusieurs poitrines féminines dénudées et, on ne sait pas bien pour quelle raison « scénique », une fille entièrement dévêtue est promenée sur les épaules d'un partenaire du fond de la salle jusqu'à la scène. Il paraît que cela ne trouble plus les jeunes gens, moins torturés qu'en son temps, pour beaucoup moins, le jeune Mauriac. Mais il faut avouer que présenté ainsi, le corps féminin privé d'un minimum de mystère l'est aussi d'attrait, assez tristement.

Ceci dit, la parodie d'une histoire d'un nouveau Tarzan fils enlevé bébé à un couple bouffon d'explorateurs britanniques perdus en Amazonie permet de moquer sans acide trop corrosif les coloniaux, les Brésiliens, la reine d'Angleterre, les héroïques officiers français du Sahara dont l'un devient un faux cheikh avec harem, les Américains, Hollywood, etc...

Si l'on veut vraiment que cette farce soit du théâtre, on peut répondre qu'on a déjà vu pire, et surtout plus sinistre. Mais c'est bien le seul vrai mérite de ce chahut farfelu.

Frédéric KIESEL

Auteur Frédéric Kiesel

Publication Le Phare Dimanche

Performance(s) Zartan, frère mal aimé de Tarzan

Date(s) du 1971-11-25 au 1971-11-28

Artiste(s)

Compagnie / Organisation Le Grand Magic Circus et ses animaux tristes