Archives du Théâtre 140

THEATRE 140

service de presse

saison 72/73

prière d'insérer svp

avant première / la MAMA de New York

du 19 au 24 septembre à 21 H.

la "MAMA" de New York revient au Théâtre 140

"MEDEA" d'Euripide et Sénèque

le génial montage en latin et en grec d'Andrei Serban

Tout Bruxelles a sans doute le sentiment d'avoir manqué "MEDEA" jouée en latin et grec lors d'un week-end en juin dernier au 140. Ces trois représentations à bureau fermé se sont déroulées devant un public de metteurs en scène, de professeurs, de comédiens, critiques, gens de radio et de TV, et de quelques passionnés non professionnels qui avaient décidé de sacrifier la mer ou la campagne pour une heure dix de spectacle d'une perfection minérale.

Après la consécration par la Presse belge, Eugène Ionesco écrit : "Je rappellerai le récent spectacle d'Andrei Serban, "Médée" où se manifeste la recherche, à tâtons, de la cérémonie, de la liturgie, de la liturgie dans le théâtre. On a peur de ces mots, le metteur en scène n'ose pas les formuler, moi j'ose. Mais les quatre ou cinq de nos critiques dramatiques qui veulent cependant gérer la théâtralité se sont refusés à parler de ce spectacle dont ils n'auraient pu enregistrer, au niveau de leurs moyens, la portée profonde. Et il s'agit bien dans "Médée" d'Andrei Serban, d'une tentative terrible, tragique, presque désespérée, inavouée, de retrouver des rites archaïques, des gestes, des sons, des modulations, des modèles que nous avons depuis toujours, au profond de nous-mêmes, au-délà de la culture, par-délà notre civilisation: des modèles, des archétypes, qu'il s'agit de faire ressortir à la lumière, en vue de la réintégration de l'humanité perdue, dans un ordre spirituel et cosmique, réinventé ou retrouvé".

Où se situe la profonde originalité du travail de Serban et de la MAMA par rapport à la proposition classique? Le Living Theatre lui s'en est pris à l'Antigone de Brecht, non à celui de Sophocle. Une version moderne, politiquement assimilée... Eh bien, ce qui a frappé si profondément la critique américaine lors de la création de "Medea",c'est sans doute le pélérinage aux sources, la fidélité aux os et à la pierre de la tragédie dans une dramaturgie dont l'avant-gardisme dépouillé et l'intimisme pourraient rejoindre ce qu'en faisaient les anciens, après tout "Medea" était leurs "Fraises sauvages", leur "Orange Mécanique", leur "Z" et le public s'y identifient comme actuellement il en est du sport.

"MEDEA", une cérémonie d'un parfum très violent, sans avoir jamais recours à l'exhibitionnisme. N'y sont priées que cent vingt personnes qui encercleront le spectacle, et sont amenées à leur place guidées par le coryphée.

Peter Brook, dont Andrei Serban est très proche, pose une question: "Quelle est la relation entre le théâtre verbal et non verbal? Que se passe-t-il exactement quand le geste se transforme en mot? Quelle est la place exacte du mot dans l'expression théâtrale? Une vibration, un concept, de la musique? Y a-t-il un témoignage quelconque enfoui dans la structure phonique de certains anciens langages?"

Andrei Serban a fait un savant découpage de deux textes originaux de "Medea", et la nervosité du raccourci actualise le spectacle sans en altérer la signification ni même la texture. On nous ramène à l'essentiel. Notre imagination va du modèle classique à son émancipation jusqu'à la fusion parfaite des deux images.

Nous avions vu à Amsterdam il y a trois ans le merveilleux "Arden de Faversham" et "Ubu roi" qui, lorsque nous nous proposions de les faire venir à Bruxelles, ne purent être présentés. La MAMA ayant été malheureusement dissoute pour un temps assez long. Durant cette période d'éclipsé, la Mama de New York a présenté une jeune compagnie d'opéra dont nous avons vu les réalisations au TRM. Helen Stewart nous aura ainsi révélé beaucoup de choses.

Evénement inespéré, la compagnie à laquelle nous devions une de nos plus fortes émotions de théâtre se reforme autour de Serban. Et cela nous amene à "Medea", croisée des chemins de la nostalgie d'un classicisme originel et de la prospective.

Rappelons que pour "MEDEA", le public sera installé sur scène. Ce qui limite la fréquentation à 120 places par soir.

"MEDEA" par la MAMA de New York au Théâtre 140 du 19 au 24 septembre à 21 H.