Archives du Théâtre 140


Au '140', Les 'New York Dolls'



La Libre Belgique

13-12-1973

Au « 140 »

Les « New York Dolls »

On avait déjà rencontré la Mama de New York au « 140 », on y a découvert les « New York Dolls » mardi soir. Après s'être coquettement fait désirer pendant une heure et demie, ces « poupées new-yorkaises » surgissent en scène, aux coups de sifflet d'un meneur de revue : cinq garçons travestis de façon agressivement originale.

Deux « dolls » en cuissardes de couleurs vives, à la tignasse informe ou à la toison moutonneuse, manient les guitares basses avec une indiscutable efficacité. La guitare solo, elle, est aux mains d'un « méchant » rocher qui shoote sur les côtés, s'oppose au chanteur ou à un autre guitariste en un face à face féroce. Il excelle dans les stridences calculées et est certainement un des plus solides éléments du groupe. La batteur assurait correctement l'indispensable contrepoint rythmique.

Le phénomène de ce groupe — qui se situe dans le style des David Bowie, Lou Reed, Velvet — c'est David Johnson, le chanteur. Vêtu d'un pantalon collant d'un mauve lamellé et d'une chemise-blouson en jeans, ornée dans le dos d'une superbe Marilyn Monroe, puis d'une petite chemise de dentelle noire, il constitue une provocation permanente. Ses yeux d'enfant pervers lancent des regards plaintifs ou cruels. Deux heures durant il défiera la salle, chantant, dansant, buvant (entre deux chansons), sautillant, repliant ses longs cheveux blonds par-dessus la nuque, empoignant le micro avec une énergie sauvage. Il possède la puissance agressive d'un Alice Cooper et exerce la fascination provocante d'un Mick Jagger jeune dont il rappelle d'ailleurs certaines mimiques, entre autres, cette moue à la fois sarcastique, sensuelle et séduisante qui a fait le succès du meilleur des « Stones ».

Ses chansons évoquent la face ténébreuse de l'Américan Way of Life. Les sujets sont délibérément « gênants »; ce sont la drogue, les « junks », les « freaks », les « marginaux ». Ils ont nom « Vietnamese baby », « Strangled in the jungle », « Frankie style ». « Juke box men » et constituent la base de « hard rock », à la rythmique un peu stéréotypée peut-être, mais qui déferlent avec une rare puissance sur la salle (il faut bien amortir les masses imposantes d'amplificateurs et de haut parleurs!) On s'étonne en tout cas qu'une voix aussi puissante puisse loger dans la frêle apparence d'un David Johnson. Il est un showmnan véritable et fit régner une ambiance folle au 140…

P. Sb.

Auteur P. Sb.

Publication La Libre Belgique

Performance(s) [concert]

Date(s) 1973-12-11

Artiste(s) The New York Dolls

Compagnie / Organisation