Archives du Théâtre 140


De Moïse à Mao ou 5000 ans d'aventures et d'amour par le Grand Magic Circus



La Dernière Heure

14-12-1973

De Moïse à Mao ou 5.000 ans d'aventures et d'amour

par le Grand Magic Circus

Jérôme Savary et la trentaine d'acteurs - danseurs - musiciens, nous offrent dans un déferlement de costumes, de scènes, de tableaux, un feu d'artifice de gags, d'idées, de drôleries.

Pendant deux heures ce sont des pitreries lancées à la cadence d'une mitrailleuse. Epoustoufflés, éhabis, on ne sait où donner de la tête.

C'est le spectacle total. Les acteurs surgissent de partout. Jouent au milieu du public. Agressivement parfois. Prenant plaisir à choquer. Mais choquer d'éventuels tabous, non pas une morale. On se moque de l'histoire de l'homme, mais on en dénoncé son côté parfois absurde, triste aussi.

D'ailleurs, tout est dérision, engendrant un rire sain. Un rire d'enfant qui contemple un album d'images « new-look ».

Car la gigantesque fresque historique nous entraîne dans la plus folle narration jamais vue sur scène.

On peut voir ainsi Mme Simone, Frankenstein, Dr Sigmund, entourant Marmaduke (Jérôme Savary) présenter un Moïse hilarant dans son numéro biblico-pop, des combats de gladiateurs coquins, un tournoi de chevaliers anémiques, une Jeanne d'Arc désopilante.

Le génial Magic Circus joue le rôle d'une minable troupe (les Vienna's Follies) qui elle même joue de manière géniale.

Un Napoléon-nain entraine dans la retraite de Russie les chauffeurs de taxis tsaristes. Chopin se fait scalper par le dernier des Mohicans. La liberté se fait guillotiner, mais relève la tête.

Successions, fééries d'images d'Epinal, le Magic atteint son but. Un théâtre populaire, s'adressant tout aussi bien à l'intellectuel en mal de nouveauté à transcender qu'à celui qui vient seulement pour s'amuser.

Tous redeviennent enfants et rient comme des gosses.

Adepte de Michelet et de sa chère théorie du théâtre pauvre, Savary trimbale son petit cirque. Homme à tout faire, auteur des hiatus historiques, il réussit à sortir, comme il le dit lui-même, des chapeaux d'un lapin. Il a eu l'idée. Espérons qu'il la garde encore. Seul.

A Louvain, le Grand Magic Circus a fait mouche. Trois jours à Schaerbeek sous un chapiteau dressé sur la place Van Ysendyck suffiront-ils pour faire apprécier un spectacle inénarable, inoubliable? On en doute. Car celui qui ira le premier jour, risque de réserver pour les deux soirées suivantes.

Il y a trop à voir. Il y a trop à rire.

Alors, si vous n'avez pas de temps à perdre, si vous n'avez pas d'argent à gaspiller, allez voir et revoir le Grand Magic Circus et ses animaux tristes.

U.STEF.

Auteur U.Stef.

Publication La Dernière Heure

Performance(s) De Moïse à Mao ou 5000 ans d'aventure et d'amour

Date(s) du 1973-12-14 au 1973-12-16

Artiste(s)

Compagnie / Organisation Le Grand Magic Circus et ses animaux tristes