Archives du Théâtre 140


'La vie de Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière'



La Dernière Heure

7-2-1974

AU « 140 »

« La vie de Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière »

Un seul regret : c'est que ce spectacle ne figure à l'affiche que durant cinq jours. C'est-à-dire que, même s'il ne reste plus un strapontin de libre au Théâtre 140, il n'y aura finalement qu'une petite minorité des amateurs bruxellois qui pourront le voir. Et c'est dommage, car le théâtre de la Salamandre ( en coproduction avec la Maison de la Culture du Havre (France) nous a probablement apporté le spectacle le plus intéressant de l'actuelle saison théâtrale.

« La vie de Jean-Baptiste Poquelin, dit Molière » — et c'est vrai, comme le disait Jo Dekmine, que c'est dommage ce titre qui fait penser à un gadget socio-culturel! — nous est proposée en effet sans pédanterie, sans le moindre souci didactique, mais avec une verve, une bonne humeur, une simplicité, un gros clin d'oeil au public, qui lui donnent une vie étonnante et lui confèrent une résonance toute particulière.

Il s'agit ici d'un travail collectif réalisé par une poignée de comédiens qui, sans remettre en question tout ce qu'on sait sur Molière, ont tout de même tenu à vérifier dans les écrits du temps ce que fut réellement cet homme Poquelin. De son œuvre, il ne sera guère question, sinon accessoirement. C'est l'homme qui intéresse, l'homme par rapport à ses contemporains et, aussi, par rapport à nous mêmes.

Et pour nous le raconter, en une vingtaine de séquences jouées sans entracte et simplement coupées par des « noirs », tous les moyens d'exposition sont bons : scènes jouées ou mimées, expression corporelle, démonstration de physique, récits de liaison, parodies commentées au micro à la façon d'un reporter sportif, chaque fois avec un maximum d'astuce et un sens très sûr du gag et un jeu d'une rare mise au point.

La musique a aussi sa part dans cette évocation, qui ne choisit pas que les temps « forts » : Gounod comme Xénakis, Lully comme Meyerbeer, de la musique de cirque comme celle léguée par la tradition japonaise interviennent chaque fois à point nommé pour souligner malicieusement un effet particulier.

Sur quoi il faut aussi insister, c'est l'étonnante économie de moyens qui a présidé à cette réalisation. Certes, la préparation a dû demander beaucoup de temps. Mais la représentation, avec huit comédiens et un seul décor fait de perches avec tentures coulissantes, est remarquable par son économie.

Et ça aussi c'est important : l'argent (ou la subvention) est loin d'être la panacée : les idées et le talent resteront toujours primordiaux.

Des « collectifs » de théâtre cette classe, on en redemande Et souvent!

R.P.

Auteur R.P.

Publication La Dernière Heure

Performance(s) La vie de Jean Baptiste Poquelin dit Molière

Date(s) du 1974-02-05 au 1974-02-09

Artiste(s)

Compagnie / Organisation Théâtre de la Salamandre