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Le Grand Magic Circus au Théâtre 140: Beaucoup de bruit pour rien



Le Peuple

21-3-1976

Le Grand Magic Circus au Théâtre 140

Beaucoup de bruit pour rien…

Toute déception est proportionnelle à l'impatience que l'on met à désirer l'événement. Voilà un certain temps que le Grand Magic Circus n'avait plus planté sa tente à Bruxelles. Sans doute, en souvenir des merveilleux instant qu'il nous avait procurés naguère, avions-nous foi en lui et espérions beaucoup de ce nouveau spectacle. Hélas, il a bien fallu déchanter. Il n'y a pas eu de miracle au 140.

Le Grand Magic Circus s'est transformé en un fourre-tout où l'on trouve un mauvais humour, très peu d'esprit, beaucoup de banalité, de la fesse et quelques gags assez conventionnels. Le tout baigne dans un atmosphère de farce qui rappelle le cortège de la Saint-Verhaegen, la farine en moins.

Le fil conducteur est en soie, si ténu qu'il se brise constamment. L'idée était pourtant généreuse. Deux directeurs de cirque, d'aventures en aventures, connaissent le succès, mais plus souvent la misère, et recherchent par tous les moyens de recouvrer l'amour du public. Ce thème aussi filandreux soit-il, est dilué dans un torrent de gags éculés, de plaisanteries douteuses et d'images sans originalité. Parfois, une étincelle prouve qu'ici, jadis, il y eut de l'esprit.

Pourtant, le père de cette troupe, au demeurant fort sympathique, Jérôme Savary n'est pas n'importe qui. C'est un homme intelligent qui transforme en or tout ce qu'il touche. Cette fois, son imagination féconde a mis au point un spectacle qui pèche par excès de trouvailles faciles, par gaspillages d'idées, par débauche de surimpressions. Le résultat? Un concert de situations qui ne s'accrochent pas entre elles et se perdent dans le vide comme les lumières d'un feu d'artifices que la nuit engloutit sur le champ.

Ce n'est vraiment pas drôle du tout cette agression à l'endroit de la royauté, pas plus que les perfidies à l'égard de la religion. L'un et l'autre se prêtent pourtant admirablement à la dérision, mais pour réussir dans cette entreprise faut-il avoir un humour à la hauteur de l'objectif.

Finalement, ce mélange de pauvreté et d'enfantillage finit par excéder. A force d'attendre l'ordre de la mise à feu, l'artificier perd son enthousiasme et supporte les événements avec indifférence.

On voudrait se réclamer d'une certaine indulgence, pardonner cette bousculade insensée, mais arrivé devant le portillon de la tolérance, il faut renoncer à la moindre indulgence.

Ces « grands sentiments » sont autant de pétards mouillés qui n'ont plus rien à voir avec le Grand Magic Circus d'antan.

C'est dommage…

Ph. G.

Auteur Ph. G.

Publication Le Peuple

Performance(s) Les Grands Sentiments

Date(s) du 1976-03-16 au 1976-03-20

Artiste(s)

Compagnie / Organisation Le Grand Magic Circus et ses animaux tristes