Archives du Théâtre 140

La Dernière Heure

13-5-1976

On a « vécu » pour 20 F au 140...

...Pour le meilleur et pour le pire

« Vivre à 20 F au 140 » deux journées de spectacle total, c'est une idée que Jo Dekmine a pu réaliser avec la collaboration des accords culturels internationaux des tournées « Art et Vie », de la commission de la culture de l'agglomération ; avec la complicité du Beurschouwburg, de l'équipe des Halles de Schaerbeek et d'Infor-Jeunes.

Ainsi, samedi et dimanche, il vous suffisait de payer 20 F — preuve qu'un bon spectacle n'est pas forcément cher — pour avoir accès au théâtre 140 ou aux Halles de Schaerbeek et passer deux bonnes journées. Jo Dekmine n'a pas voulu donner l'horaire détaillé de cette manifestation afin de forcer, par exemple, un « fan » de pop musique venu voir le groupe américain du « Country Gazet » à assister à la prestation de l'ensemble de flûtes à bec Jean Delcour.

Journées à surprise — bonnes et mauvaises — donc.

Samedi soir, aux Halles, les « freaks », les « beatniks » et la « young génération » étaient bien représentés. Faut dire : « 20 balles, c'est pas cher pour deux jours de jazz, de pop, de folk, de danse... ». On m'avait dit que ce soir ce serait sans doute « terrible », il y aurait en piste la troupe de théâtre underground du People Show, de Londres.

Oui, c'était terrible. Pendant une heure et demie s'est ouvert devant nous l'univers onirique d'une bande de cinglés, de tarés, de dégénérés. Une histoire de boxeur vaincu par un œuf... si j'ai bien compris?! Si je fais erreur, j'ai des excuses, le texte n'était pas là pour m'aider : « Tizi-Zizi, Zaza-Zoulou, Daliba »... etc. Bah! je n'ai jamais rien compris à la langue anglaise.

Outre la communication par onomatopées, si vous appréciez le spectacle gratuit d'un homme torture qui crache du sang, allez-y voir. Moi je n'ai pas ri. Je suis peut-être le seul : il y avait 300 personnes entassées dans le décor dantesque des halles de Schaerbeek et 200 autres attendaient dehors! Beaucoup de jeunes. Pour eux je me suis inquiété.

Mais il n'y avait heureusement pas que cela dans « Vivre à 20 F au 140 ». Dimanche par exemple, le groupe pop belge « Kleptomania » allait une fois de plus déchainer les foules. Fidélité au blues, à la mélodie, a la « pop music classique » : les vieilles recettes sont les meilleures!

Dans son coin, Alain Pierre submergé par les amplificateurs se drogue du clignotement des ampoules de son synthétiseur. Se jouant des potentiomètres comme on frappe une touche de piano, il produit une musique intergalactique qui nous fait apprécier ses talents en électronique plus qu'en art vrai.

Enfin, Pierre Rapsat (le groupe pop, pas le chanteur de l'Eurovision) vient. Révélé en 1975, on est en droit d'en espérer beaucoup et son concert nous aura prouvé une nouvelle fois qu'il a du « muscle ».

En somme, deux journées honnêtes. On y aura trouvé à boire et à manger (on servait du stoemp!) et les jeunes aux cheveux longs arrivés en masse y auront « pris leur pied » (expression à la mode pour dire qu'on se sent bien).

A.G.