Archives du Théâtre 140

La Cité

27-1-1977

LE LIVING THEATRE AUX HALLES DE SCHAERBEEK

« Sept méditations sur le sado-masochisme politique »

On ne les avait plus vus ici depuis 1969. On savait que les membres du Living Theatre avaient connu des vicissitudes et des traverses (pour ne pas dire plus) et notamment une incarcération au Brésil, pays de dictature.

Le Théâtre 140 nous les ramène, aux Halles de Schaerbeek avec ces « Sept Méditations sur le sado-masochisme politique ». Le spectacle — si spectacle il y a — ne démarre qu'au bout d'une vingtaine de minutes chacun des membres de la troupe venant à tour de rôle s'asseoir dans un espace délimité à la craie et en posture de yoga. Après un long silence va succéder une mélopée qui accompagnera les « Sept Méditations ».

Ce mot en l'occurrence trop ambitieux désigne sept textes sur l'argent, la propriété, la violence policière et guerrière, l'Etat, les lois, etc (je cite en vrac), textes qui sont partiellement joués à travers un rituel le plus souvent symbolique. Pour dénoncer les tortures, un des membres de la troupe est suspendu à des bâtons, on lui introduit des électrodes dans le fondement et le supplice des décharges électriques est représenté. Si l'on met en relief cet épisode, c'est non point pour son aspect « scandaleux », mais parce qu'il illustre bien l'ambiguïté (d'ailleurs non délibérée) d'une démarche qui, se voulant dénonciatrice, aboutit à la complaisance.

Quant aux textes, mieux vaudrait n'en point parler tant leur simplisme et leur caractère utopique découragent la discussion. A un certain moment les acteurs vont au public et demandent : « Suis-je ton esclave? ». Et à la réponse négative du spectateur interpellé, l'acteur rétorque : « Si, je suis ton esclave ». A la fin du spectacle, tous les membres de la troupe entament gentiment le dialogue avec les spectateurs.

Cela est bien touchant et l'on pardonnerait à des collégiens une telle ingénuité. Quand elle est le fait de personnes chauves et marquées par l'expérience cruelle de la vie comme c'est le cas pour plusieurs membres de la troupe à commencer par son animateur Julian Beck, c'est plutôt attristant, non?

J.L.