Archives du Théâtre 140


La nouvelle saison du Théâtre 140: une agence de voyages 'intérieurs'



Le Soir

2-10-1978

La nouvelle saison du théâtre 140 : une agence de voyages « intérieurs »

Brillante conférence de presse pour une brillante saison : Jo Dekmine a présenté la programmation 1978-79 du théâtre 140. Comme il l'a dit, ce sera une occasion de « voyager de l'intérieur, de connaître les autres par leur art, de savoir qu'un moment d'atmosphère de la rue Josaphat est aussi important qu'un monument classé comme la « petite sirène » de Copenhague: ce sera aussi une saison basée sur l'instinct, sur le plaisir, sur l'imagination. Parcourons-la :

— Plantons sous la suie : une comédie musicale française par la bande du Café de la Gare de Paris. Sous cet énorme jeu de mots se cache un spectacle drôle et parodique de Claude Mann (partenaire de Jeanne Moreau dans « La Baie des Anges »). Burlesque assuré (du 12 au 21 octobre; également à Huy, à Seraing, à Tournai, à Binche et à Hornu).

— Vedutti di Porto Saïd : dans une ligne qui rappelle Bob Wilson et Marguerite Duras, c'est un spectacle de la compagnie italienne « Groupe II Carrozzone » (25 au 29 octobre).

— Raymond Devos : réinventeur permanent, best-seller de l'insolite (14 au 26 novembre).

— Renaud: un loubard entre Guichard et Béranger. De la violence, de l'impertinence, de la tendresse parigote. Il a été reconnu par le jury du Festival de la chanson de Spa (30 novembre au 2 décembre).

— Le Living Theatre de New York dans « Prometheus changed », une fable modernisée où Prométhée déambule dans le contexte de la violence actuelle. D'après Jo Dekmine, ce spectacle est un tournant dans l'orientation du Living (4 au 9 décembre).

— The World Saxophone Quartet : Hamlet Bluiett, Julius Hemphill, Oliver Lake et David Murray: pour la première fois en Belgique, un quartet entré dans la légende du nouveau jazz (18 décembre).

— Les Dzi Croquettes : des travestis brésiliens interprétant « Les speakerines ». Ils dansent avec dérision et noblesse dans de grands déshabillés roses : ils zozotent avec l'accent brésilien en imitant les speakerines françaises. Aux yeux des Dzi, la France est exotique (28 au 31 décembre).

— Jacques Villeret: ce gros garçon, tendre et drôle, vrai et sain, a été révélé par Lelouch dans le film « Les Bons et les Méchants ». A Paris, actuellement, c'est la grande vogue (10 au 12 janvier).

— Luc Desmet et Jay Geary dans « Panem et circenses » : le comique visuel poussé dans ses retranchements. Deux clowns pour grandes personnes fort connus en Flandre (au 140 ou au campus de l'U.C.L., dates à déterminer).

— Farid Chopel dans « Chopelia » ; sur les traces de Bob Wilson, dont il est l'élève, et de Mister Maggoo, le célèbre myope des dessins animés. Chopel a inventé un comportement timide et emphatique. On rit mais inquiet et attendri par cet « animal » nouveau. Et si l'on songeait à Charlie Brown? (23 au 27 janvier).

— La Compagnie des Pouilles : « Sulla Via di San Michele », un nouveau spectacle fait de chants anciens des Pouilles et d'images fascinantes. Une représentation, dit Jo Dekmine, qui ressemble à ces statues saintes polychromées qu'on promène dans les processions (14 au 17 février).

— Le People Show de Londres : ce théâtre londonien a inventé, à travers le caf'conc' (ou d'autres langages soi-disant « bon marché » ) un art aussi strict que le nô ou le kabuki. Bref, un spectacle d'initiation où le rire côtoie la dérision (19 au 23 février).

— Rufus : il jouera « Le Héros national » qu'il a écrit. Superbe retour de ce grand bonhomme qu'on vient de voir, à Avignon, dans « En attendant Godot » (1er au 4 mars).

— La Maschera de Rome : le metteur en scène romain Meme Perlini propose « L'Eveil du printemps », d'après Wedekind. Le réalisme et la clarté de ce nouveau travail déroutera peut-être ceux qui se régalaient de l'ésotérisme de l'« Othello » de Perlini. On y verra des comédiens parler de ce qu'ils ont vécu, de leur adolescence (20 au 24 mars).

— Django Edwards : cet Américain propose « Foolies 3 », du music-hall éclaté. C'est un grand mime d'un prosaïsme indispensable (assez de Pierrots, ajoute Dekmine!). En avril-mai (en projet).

Une conférence de presse pour les Halles

Les amateurs d'avant-garde, de curiosités, de théâtre de recherche ou de music-hall « différent » ont, on le voit, le choix : un choix intelligent et qui mérite un profond respect : si Jo Dekmine n'existait pas, il faudrait l'inventer!

Signalons encore que la scène du 140, transformée, permettra, à l'occasion, de mieux intégrer les spectateurs à des œuvres intimistes et que Dekmine promènera aussi certaines de ses trouvailles au campus de l'U.C.L., à Woluwe-Saint-Lambert, en province et, peut-être aux Halles de Schaerbeek (pour autant que les autorités concernées trouvent une affectation précise à cet endroit : parlant de ce sujet, qui lui tient fort à cœur, devenu soudain très grave, Jo Dekmine, en tant que membre du Collectif des Halles, a annoncé, pour fin octobre ou début novembre, une conférence de presse de cette équipe à ce sujet.

L. H.

Auteur L.H.

Publication Le Soir

Performance(s)

Date(s) 1978-10-02

Artiste(s)

Compagnie / Organisation