Archives du Théâtre 140


Protestation du Festival international de théâtre contre une intervention de police



Le Soir

7-11-1979

Protestation du Festival international de théâtre contre une intervention de police

Une centaine de personnes fort attentives ont suivi, lundi après midi, la conférence de presse donnée par les organisateurs du Festival international de théâtre de Bruxelles. Rappelons, très brièvement, les faits.

Une troupe new-yorkaise, le Squat Theatre a présenté, jeudi soir, Andy Warhol's last love, une représentation qui a mené avec succès le Squat de Rome à Bruxelles, en passant par Hambourg et Belgrade. Un des fondements du travail de cette troupe est de provoquer la rencontre du théâtre et de la rue, de la fiction et de la réalité. C'est pour cela qu'une partie du spectacle se déroule dans la vitrine d'un ancien snack du boulevard Anspach (Ancienne Belgique). Jeudi soir, un inspecteur de la ville de Bruxelles, aperçut une des actrices célébrant un rituel autour d'un récepteur de télévision. Cette scène, précisent les organisateurs du festival, ne présente aucun caractère d'obscénité ni de provocation mais, conformément au rituel, elle est accomplie par une femme nue visible de la rue par les passants et, sur des vidéos, par les spectateurs. L'inspecteur dressa procès-verbal. Le lendemain, un inspecteur de la police judiciaire se présenta au Centre du festival (l'ancienne Maison de la presse) pour signifier l'arrestation immédiate des acteurs, metteurs en scène et organisateurs du spectacle, ainsi que la saisie du décor si cette scène était jouée à nouveau. Le spectacle, fut-il dit à la conférence de presse, était en fait interdit.

Le vendredi soir, plutôt que de censurer ce spectacle, Michel Dezoteux l'arrêta au moment de la scène du rituel, fit une déclaration, signalant la présence des forces de l'ordre aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur de la salle. Samedi soir, répondant à la censure par la dérision, disent les organisateurs du festival, l'actrice nue célébrant son rituel était remplacée par une fillette célébrant le même rite autour d'une statuette de Manneken-Pis, nudité... jamais censurée!

Des nombreuses protestations lancées au cours de la conférence de presse, tant par les organisateurs, par des personnalités du spectacle bruxellois que par le Squat Theatre (« Nous étions invités par la Belgique », a souligné un membre de la troupe), il ressort que des pétitions circulent dès à présent contre l'intervention de la police et en faveur d'une évolution des mœurs, qui suivrait moins la lettre de la loi que l'évolution des activités artistiques. Certains s'érigèrent aussi contre le fait que l'exhibition du corps humain est acceptée pour des raisons mercantiles (cinéma, publicité, etc.) et pas pour des raisons artistiques. « Cessons d'humilier les gens par rapport à leur corps », a précisé Jo Dekmine du 140...

Bref, cette affaire, qui remue beaucoup les esprits dans tous les sens, connaîtra sans doute de nouveaux rebondissements.

Il fut aussi ajouté que le spectacle a été joué à New York, à Milan, à Hambourg, à Rome, à Belgrade, à Rotterdam. Deux pays auront refusé une réelle représentation : la Belgique et l'Iran du Shah.

L. H.

Auteur L.H.

Publication Le Soir

Performance(s) Festival international de Bruxelles

Date(s) du 1979-10-19 au 1979-11-10

Artiste(s) Meredith MonkIl CarrozzoneMabou MinesTom JohnsonWinston TongJoan La BarbaraOdin TeatretCharlemagne PalestineElectric PhoenixTrisha BrownTrianglesPlan KLaurie Anderson

Compagnie / Organisation Théâtre ElémentaireSquat Theatre