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'Radeis' au Théâtre 140: quatre pongistes du gag



La Libre Belgique

28-2-1980

« Radeis » au Théâtre 140 : quatre pongistes du gag

Il était une fois quatre pongistes autour d'une table, et quatre balles. Le premier lançait la sienne, que rattrapait au vol le second joueur, tandis que le troisième, faisant de même, croisait la balle que le quatrième destinait au premier; et ainsi de suite, de plus en plus vite, jusqu'à ce que la table semblât parcourue de mille balles, filant en tous sens en folle effervescence, toujours plus vite.

Tout ceci n'était qu'un conte, bien entendu, une histoire inventée. Jusqu'au jour où, pourtant...

Quatre Flamands sont venus, nommés Dirk, Jos, Jan et Pat. Le premier lança un gag, que fit rebondir le second pendant que le troisième, d'une astuce, soulignait la mimique du quatrième que s'apprêtait à poursuivre le premier; et ainsi de suite, de plus en plus vite, jusqu'à ce que la petite salle du Théâtre 140 fût secouée de mille éclats de rire à chaque instant. Radeis donnait corps à la légende!

Le plus merveilleux, en somme chez les quatre mimes-acteurs-régisseurs de la troupe, c'est la parfaite innocence avec laquelle ils suscitent l'hilarité : ils ont saisi sans aucun doute tout l'art du slapstick, cet humour à froid, absurde et naïf, si typiquement anglo-saxon que la langue française n'a guère eu besoin jusqu'ici de trouver au mot un équivalent.

Innocence étudiée, cela va sans dire. Le petit décor champêtre de « Pour cause de maladie n' est une merveille d'ingéniosité, aussi minutieusement assemblée que le spectacle lui-même, un joyau d'horlogerie comique que n'eussent pas désavoué les Frères Jacques ou... les Marx Brothers. Chaque sketch reprend cette construction en miniature, tissé de cent trouvailles habiles. La parodie du quotidien, enfin, ce burlesque en mineur si cocassement observé, est d'une justesse qui permet à l'ange du bizarre les déguisements les plus inattendus, les traits les plus piquants et banals à la fois, petits personnages de la vie taillés dans la masse de l'étrange.

Mine de rien, sans se préoccuper de métaphysique de l'absurde ou de décaper le monde, Radeis a bâti le spectacle parfait : un petit joyau de drôlerie qui est aussi son propre écrin, se retournant comme un gant de caoutchouc pour mieux rebondir ensuite...

DANIEL DE BRUYCKER.

Jusqu'au 29 février au Théâtre 140 à 20 h 30.

Auteur Daniel De Bruycker

Publication La Libre Belgique

Performance(s) Radeis wegens ziekte [Pour cause de maladie]

Date(s) du 1980-02-26 au 1980-02-29

Artiste(s) Radeis

Compagnie / Organisation