Archives du Théâtre 140


Macunaïma et le Brésil au 140: Corto Maltese aimerait!



Le Soir

27-5-1980

Macunaïma et le Brésil au 140 : Corto Maltese aimerait!

S'il fallait parler froidement de Macunaïma, le spectacle brésilien que le groupe « De Arte Pau Brasil » a présenté, jeudi et vendredi, au Théâtre 140, on dirait que trois heures et demie de représentation c'est bien long quand on ne comprend pas la langue utilisée par les acteurs (un programme résume l'action mais de nombreuses nuances sont perdues). Un confrère parisien avouait même, lors de la récente présentation de Macunaïma au Festival de Nancy, qu'il avait quitté la salle après une heure de représentation et il résumait ainsi ce qu'il avait vu : « Un spectacle mi-ethnologique, mi-folklorique, sur un Indien du Brésil en quête de son identité »...

Cette impression, si elle n'est pas tout à fait fausse, se transforme à partir du deuxième acte (le premier est très bavard). Soudain, une sorte de magie s'empare du spectateur; la représentation s'impose, le temps n'a plus d'importance et la langue n'est plus qu'une musique.

Comment vous faire « sentir » Macunaïma? En disant que ce

spectacle dégage le même mystère fantastique, la même attente joyeuse et nostalgique que les bandes dessinées d'Hugo Pratt (Corto Maltese) ou de Manara (Giusseppe Bergman et H.P.)? Oui... Mais il faut ajouter que Macunaïma a aussi la grâce fragile, la non-violence profonde, la sage simplicité de la fable de La Conférence des oiseaux, présentée par Peter Brook, l'an passé, au Festival d'Avignon.

L'histoire coule comme un fleuve, tantôt rapide, tantôt lente, avec ce parfum de joie, de mort et de fleurs aux senteurs fortes et décadentes, si particulier au Brésil où tant de civilisations se brassent, où misère et richesse, torture et carnaval, poésie et sorcellerie, se bousculent.

Quelques « tableaux » sont particulièrement remarquables : la beauté soufflante d'une actrice noire dont la nudité totale est une cascade; le lent passage d'un cortège bariolé de carnaval qui s'avance comme un songe; un groupe de statues vivantes; de vieux journaux qui se transforment en costumes délirants; etc.

Macunaïma est comme une jungle brésilienne, à la fois moite, innocent, dangereux, enveloppant, hypnotisant. Parmi une dizaine de comédiens, Carlos Augusto Carvalho (le rôle de l'Indien Macunaïma qui quitte sa tribu pour se « perdre » dans la grande ville) s'impose comme un très grand acteur.

LUC HONOREZ.

En bref...

Le spectacle annoncé pour le 26 mai au Centre culturel Samuel Donnay, à Flémalle, animé par le groupe de danseurs yougoslaves « Miljenko Cvitkovic », n'aura pas lieu, le visa ayant été refusé au groupe.

La classe des Sciences morales et politiques de l'Académie royale des Sciences d'outre-mer a tenu séance sous la présidence de M. M. Luwel, vice-directeur. Elle a pris connaissance des études suivantes : 1. S. Plasschaert : « Functies en determinanten van de inkomstenbelastingen in ontwikkelingslanden »; 2. R. Rezsohazy : « Conceptions actuelles du développement communautaire ».

Auteur Luc Honorez

Publication Le Soir

Performance(s) Macunaïma

Date(s) du 1980-05-22 au 1980-05-23

Artiste(s) De Arte Pau Brasil

Compagnie / Organisation