Archives du Théâtre 140


Enfin Mabou Mines à Bruxelles: A Prelude to Death in Venice. John le petit californien de Venice s'énerve à Manhattan. New York comme si nous y étions…



THEATRE l40

Saison 80/81

Service de Presse

Avant-Première

Prière d'insérer svp.

Au THEATRE 140

DU 1er au 5 octobre à 20 h30

ENFIN MABOU MINES A BRUXELLES

A PRELUDE TO DEATH IN VENICE

John le petit californien de Venice s'énerve à Manhattan

New York comme si nous y étions...

"Il doit être merveilleux d'avoir une marionnette vivante, une chose derrière laquelle on se cache, qu'on manipule pour faire toutes les choses outrageuses qu'on n'oserait pas faire seul."

Voilà défini au premier degré le nouveau spectacle du Mabou Mines par le "New York Post".

"Comment parler durement à ses parents au téléphone, remballer des gens à qui l'on doit de l'argent..." John la marionnette plus vraie que nature qui téléphone à deux personnes à la fois sur un trottoir de Lafayette Street est le double et la victime du comédien Bill Raymond et c'est Lee Breuer qui a imaginé "tout ce pastis", comme on dit dans les séries noires.

Nous nous retrouvons dans la situation de l'étranger à New York qui regarde de son arrêt de bus un personnage en blouson simili-cuir téléphoner à la moitié de la ville en empruntant des voix et des accents différents suivant ses états d'âme et la nature de ses interlocuteurs. L'unité formée par "John" et Bill Raymond qui le manipule a quelque chose de monstrueux, chacun des deux visages est l'ombre furtive de l'autre.

Nous avons vu "Prelude" dans le East Village, au Public Theater, pas loin du Bowery. C'était de tous les spectacles à l'affiche le plus évocateur des revers pathétiques de la way of life new yorkaise dont les musicals à Broadway seraient l'endroit.

John et son double jouent les Préludes et Fugues en si majeur de Bach sur les touches des deux téléphones, tout le monde rit évidemment, on rit aussi lorsque le "Mercury Message Service" lui fait entendre les messages enregistrés de son père défunt ou lorsqu'il forme le numéro de "John Anonyme", organe de dissuasion politique par correspondance. Très drôles sans doute les coups de film d'une marionnette traquée, à la recherche de son identité, changeant tout le temps de voix. En effet, quand on n'est personne, on est un peu tout le monde, une foule en quelque sorte... Dans "Prelude" comme dans la vie, le langage parlé est informe, coupé de silences embués par le froid ou suant le chaud. (Il semble ici que ce soit l'hiver?).

Un monologue riche en onomatopées, une ponctuation folle, Lee Breuer met les virgules comme les soupirs d'alcôve, au petit bonheur, mais avec la précision machiavélique des gens qui "contrôlent le flou".

Hopper, peintre de la solitude américaine - la solitude des grandes villes - nous mettait l'oeil à la serrure de la villa d'en face, les Mabou Mines nous collent l'oreille aux portes et nous ne saurons jamais ce que la mère ou les petites amies de John, ce que ses correspondants masculins ont pu lui répondre entre deux murmures "johnesques" où il est question de films, de revolvers, de ruses, de drogue, ou d'orgasme et si l'on veut être attentif, de tout cela dynamisme du chaos verbal, c'est comme cela que le théâtre devrait s'écrire toujours, grammaticalement impraticable, ornière...

"...La confusion entretenue est grande et volontaire, au niveau de la position sociale, du sexe, de la parenté, de l'emploi que l'on a de lui, des valeurs culturelles et gouvernantes qui le régissent et enfin de sa propre totale confusion!!"( Village Voice)

Un moment Bill Raymond tuera (ou feindra de tuer?) John sa marionnette afin de s'attribuer le bénéfice du texte, il tue simplement parce qu'on tue couramment à New York et, du coup, une énorme roue de voiture apparaît dans le cadre de la scène. C'est une voiture de police en mal de constats. Inutile de comprendre le monologue de John sur fond de "Mort à Venise" en 16 mm, il est d'ordre litanique, destiné à être entendu comme une chanson de Léonard Cohen ou de Bob Marley. C'est le reggae des visages pâles...

MABOU MINES, du 1er au 5 octobre au Théâtre 140, à 20h30

"A Prelude to Death in Venice".

Auteur

Publication [persbrochure]

Performance(s) Un prélude à Mort à Venise

Date(s) du 1980-10-01 au 1980-10-05

Artiste(s) Mabou Mines

Compagnie / Organisation