Archives du Théâtre 140


'Trahisons men' au 140. La condition humaine par la compagnie Mark Tompkins



La Libre Belgique

20-10-1985

« Trahisons men » au 140

La condition humaine par la compagnie Mark Tompkins

Américain de naissance, danseur par la force des choses, bricoleur de sons et d'images par nécessité, autodidacte par préférence, Mark Tompkins a travaillé avec Lila Grenne, Harry Sheppard, Lila Nelson, Steve Paxton... Dans son dernier ballet-spectacle performance (?), six hommes dansent, représentent l'homme.

Des corps masculins, torses nus, s'affrontent en file par gifle interposée. Refus et rupture. Le dernier rend le soufflet. Une silhouette de chair et d'os arbore de dos un immobilisme coincé sous imperméable et chapeau passe-partout. Magritte de ballet comme un regard étranger et absent sur le monde.

Les cris étouffés et nocturnes de bêtes sauvages percent çà et là le silence, et le combat des hommes se construit, précis et net, avec puissance et humour. Dans cette danse théâtralisée des rapports masculins, les organes des sens (yeux, bouches, oreilles) sont épisodiquement occultés. Les corps atrophiés, agressés, poursuivent cependant leurs gestes.

Les chutes succèdent aux chutes, éternel départ recommencé. Et sur les murs du fond, des projections en série décomposent graphiquement le mouvement des danseurs comme un hommage contemporain au pionnier Edward Muybridge.

Caresse, ivresse. Douceur et arrogance. La lutte se poursuit. Les corps-paquets de poids sont transbahutés de bras en bras. Une première partie s'achève. Le deuxième volet du triptyque s'ouvre à la lumière. Titre : la femme. Chutes et rechutes rythment l'ivresse d'une love song « soul ». Les rencontres existent par le rejet violent d'un corps. Les torses se bombent et se parent, ironiques, d'un seul nœud de papillons pour une parade de séduction. Puis se dévoile le troisième volet : l'humain. Les corps presque nus sont la cible d'une lumière lézardée, projetée par un étranger habillé, le traître qui s'insinue dans leur fragilité d'hommes. L'éclairage brisé les transforme, réels, bagnards de vie. Leurs ombres noires les mangent. Et le mouvement théâtralisé vit comme un conte mythique d'une société moderne mis en scène ou chorégraphié avec force et maîtrise.

Claire DIEZ.

Ce samedi soir, à 20 h 30, au Théâtre 140, av. Plasky.

Auteur Claire Diez

Publication La Libre Belgique

Performance(s) Trahisons Men

Date(s) du 1985-10-15 au 1985-10-19

Artiste(s) Mark Tompkins

Compagnie / Organisation